[ceci est la minute de la réponse de Quetelet à la lettre du gouverneur du 22 mars 1828]
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[note moderne au crayon] 011
À Monsieur le Gouverneur de la province de Brabant méridional &a
Monsieur le Gouverneur,
Je m’empresse de répondre à la lettre que vous m’avez fait l’honneur de m’adresser relativement aux terrains qui se trouvent derrière l’Observatoire et qui doivent être vendus sous peu. Je pense que leur acquisition faite par le gouvernement serait d’une utilité majeure pour la science. L’instrument principal dont j’aurai à me servir, la lunette méridienne, doit être vérifiée chaque jour sur deux mires placées à distance vers le sud et vers le nord. Le côté du sud est libre, mais j’ai à craindre qu’on ne m’enlève, vers le nord, les moyens de vérification. Indépendamment de ces motifs, il importe, pour toute les espèces d’observations, de conserver toujours le méridien libre ; c’est un point fondamental pour l’astronomie d’observation. Je ne connais point d’observatoire où l’on n’ait eu égard à ce principe.
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J’ignore si le terrain que l’on doit vendre sera séparé en lots ; peut-être vaudrait-il mieux pour le gouvernement pouvoir faire l’acquisition de tout afin d’en disposer ensuite selon les besoins ; en vendant par portions ce qui deviendrait inutile, on pourrait peut-être y trouver encore de l’avantage ? Dans le cas où la vente se ferait par lots, il serait utile de prendre ce qui est situé, derrière l’observatoire au nord, dans la direction du château de Laeken ; il suffirait de la partie du terrain qui correspond au milieu du bâtiment de l’observatoire sur une largeur de 18 à 20 mètres et sur une longueur vers le nord la plus grande possible… J’ai tâché d’indiquer la partie du terrain qu’il conviendrait d’avoir, sur un petit dessin que je fais de mémoire et que je joins à cette lettre. Quant au prix des terres, je suis très mauvais connaisseur et je n’ose même prendre des renseignemens par moi-même de peur d’éveiller des soupçons et de rendre tout marché impraticable. Je tâcherai cependant d’obtenir des renseignemens par une personne de confiance et m’empresserai de vous faire parvenir ceux que je pourrai me procurer. C’est afin d’éviter toute perte de temps que je commence par répondre à une partie de la demande que vous avez bien voulu m’adresser.
J’ai l’honneur de vous communiquer aussi, sur les services que pourraient rendre M. NERENBURGER à la Commission de statistique, quelques détails qui m’ont été demandés.
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M. NERENBURGER aurait à s’occuper particulièrement des différens calculs des rapports et des vérifications des résultats indiquées par le calcul des probabilités, ce qui exige une personne au courant de la théorie et habituée à ses sortes de travaux.
DE VLEESCHOUDERE. Il devrait s’occuper en outre du dépouillement des registres, opération particulière qui demande cependant d’être faite par une personne intelligente. Il faudrait par exemple le relevé des décès par individu, âge, par profession, &a, afin de faciliter la construction des tables de mortalité si utiles pour une foule de spéculations et particulièrement pour les Sociétés d’assurances. La seule table que nous ayons pour ici, et je puis dire pour le royaume, a été faite par moi avec le secours de trois de mes anciens élèves. J’y ai travaillé plusieurs mois, mais elle est encore incomplète. On désire aussi un dépouillement des registres des hôpitaux, que M. VAN MONS ne peut entreprendre à cause de ses autres occupations ; d’autres membres ont manifesté également le désir d’avoir des relevés qu’ils ne peuvent faire par eux-mêmes. Déjà M. NERENBURGER a constaté un résultat sans doute d’un intérêt secondaire mais curieux pour les sciences naturelles, savoir que les tailles des individus sont plus grandes dans les villes que dans les campagnes, contre le préjugé généralement [reçu ?] ; ce résultat s’accorde avec celui obtenu à Paris et se trouve établi par plus de 3 500 nombres.