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À Monsieur le Ministre de l’Intérieur
Bruxelles, le 18 décembre 1853
Monsieur le Ministre,
Par un arrêté de votre prédécesseur, en date du 30 septembre 1841, Mr Arsène BEAULIEU a été attaché à l’Observatoire royal en qualité d’aide mécanicien ; et se trouvait, par suite de l’article 11 du règlement, chargé de l’entretien des instruments, des réparations à y faire et de la confection des petits appareils : il pouvait aussi être appelé par le directeur à prendre part aux observations.
Quelque temps après sa nomination, Mr BEAULIEU, comme j’eus l’honneur d’en donner connaissance à votre prédécesseur par ma lettre du 10 avril 1844, demanda à se faire remplacer dans les travaux d’observation par un adjoint à qui il passait une partie de son traitement ; ce qui lui fut accordé. En sorte qu’il ne restait plus chargé que de l’entretien des instruments, des réparations à y faire et de la confection des petits appareils.
À quelques négligences près, je me tins satisfait de son service, prenant d’ailleurs en considération son mérite réel comme mécanicien. Cependant, vous pourrez remarquer, Monsieur le Ministre, que, dans mes rapports annuels, je ne tardai pas, tout en louant le zèle et l’activité de mes autres aides, de m’abstenir complètement de parler de Mr BEAULIEU.
Au mois de mai 1850, je crus devoir faire des représentations plus sévères ; et à la suite d’une réponse inconvenante qui contenait une espèce de défi de toucher à sa position, je crus devoir lui donner des avis dont il a peu profité : je lui disais dans une lettre du
10 mai 1850 : « pour répondre à votre défi de pouvoir exercer aucune action sur vous, il me suffirait, Monsieur, de vous faire connaître que M. le Ministre de l’Intérieur, à plusieurs reprises, et tout récemment encore, m’a proposé la suppression de votre emploi. S’il n’en a rien fait, c’est sur ma prière. Vous perdez sans doute de vue deux articles du règlement de l’Observatoire que j’aurai l’honneur de vous rappeler (les articles 14 et 15). Ils achèveront de vous prouver qu’il n’est point entré dans ma pensée d’user de rigueur ; mais je dois naturellement tenir à ce que les instruments ne restent pas en souffrance ».
M. BEAULIEU chercha à se justifier, et je pris encore patience. Les instruments, cependant, restaient dans un état déplorable. Les choses depuis sont venues à ce point que je n’ai pas vu M. BEAULIEU plus de trois à quatre fois dans le cours de toute cette année et encore, pendant quelques instants seulement. M. BEAULIEU, me dit-on, a une entreprise de chemin est entièrement absorbé par les travaux d’entreprise d’un canal dans la Campine. Quand j’écrivais d’une manière trop pressante, il m’envoyait un de ses ouvriers qui n’avait nullement égard à ce que je lui demandais.
D’après les notes que j’ai tenues, cet ouvrier est venu deux à trois fois au commencement de 1853. Il a travaillé ensuite à nettoyer quelques instruments pendant 5 à 6 jours au mois de juin, et pendant 4 à 5 jours, au mois d’octobre. Je ne l’ai plus revu Il n’a plus réapparu depuis.
J’ai eu l’honneur de me plaindre verbalement à vous, Monsieur le Ministre, pendant cet été, et vous m’avez engagé à en finir. J’ai demandé à pouvoir patienter encore, mais le mal me semble aujourd’hui parvenu à son comble et exiger un prompt remède.
Il n’entre pas dans ma pensée de proposer une mesure qui puisse blesser la susceptibilité de M. BEAULIEU ; mais je sais qu’il est plus que temps de faire cesser un abus qui est d’ailleurs d’un fâcheux exemple pour mes autres aides.
J’aurai donc l’honneur, Monsieur de Ministre, de vous proposer que
1° les fonctions de M. A. BEAULIEU, aide mécanicien à l’Observatoire royal, cessent à partir du 31 décembre prochain.
2° la partie des observations astronomiques reste confiée à M. Henri Désiré GRÉGOIRE qui en était chargé déjà depuis le mois de décembre 1844.
3° l’entretien et la réparation des instruments, et la confection des petits appareils soit confiée à M. Léopold BLANPAIN de Bruxelles.
4° le traitement de 1 200 francs dont jouissait M. BEAULIEU soit partagé entre MM. GRÉGOIRE et BLANPAIN.
M. GRÉGOIRE a fait preuve, depuis plusieurs années, de zèle et d’intelligence, et il n’y a pas lieu dans l’état actuel des choses de lui retirer la partie des fonctions dont il est chargé.
Quant à M. BLANPAIN, jeune horloger intelligent et que j’ai à l’épreuve depuis peu de temps, il me semble prendre à cœur l’entretien et la confection des instruments, et je crois que j’aurai lieu d’être satisfait de ses services. J’ai reçu d’ailleurs de très bons renseignements sur sa moralité.
Il me reste à vous prier, M. le Ministre, de vouloir bien, si vous les approuvez, adopter ces arrangements avant la fin de l’année. J’espère avoir à vous présenter bientôt des mesures pour remplacer mon 4e aide dont la place reste en souffrance, au grand préjudice des travaux de l’Observatoire.
Agréez, &a